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13/9/2020

Mort de Chantel Moore: vers un changement des mentalités

temps de lecture:
5 Minutes
Initiative de journalisme local
ILLUSTRATEUR:
COURRIEL
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Note de transparence

Le groupe s’est de nouveau réuni le 5 septembre devant le parlement de la Colombie-Britannique pour réclamer des changements aux contrôles de bien-être et la création d’un organisme de surveillance autochtone dans le cadre de l’enquête sur la mort de Chantel Moore. Cela fait trois mois que la jeune femme a été tuée par un policier lors d’un contrôle de bien-être à Edmundston, au Nouveau-Brunswick.

Depuis, sa famille et ses sympathisants ne cessent de réclamer justice et de demander des modifications à ce protocole de police.C’est la deuxième fois depuis le décès de Chantel Moore que sa famille et ses sympathisants se rassemblent sur les marches du parlement de la Colombie-Britannique. De nouveau, ils ont exigé des changements aux contrôles de bien-être et la création d’un organisme de surveillance autochtone.

« Nous sommes réunis ici aujourd’hui afin de faire savoir d’une voix forte au pays que nous ne resterons pas les bras croisés. Non, nous ne resterons plus les bras croisés, a déclaré Marth Martin, la mère de Chantel. Je ne devrais pas avoir à implorer qu’on rende justice à ma fille. La vie de nos enfants compte. Ma fille était plus qu’un numéro sur une carte de statut… »

Chantel Moore était membre de la Première Nation Tla-o-qui-aht. Sa mort fait actuellement l’objet d’une enquête du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), l’organisme québécois chargé de la surveillance de la police.Il a été demandé à Judith Sayers, présidente du conseil tribal Nuu-chah-nulth, duquel la Nation Tla-o-qui-aht est membre, d’être la porte-parole de Mme Martin lorsque celle-ci a été submergée par l’émotion.

« Savez-vous quelle est l’ironie terrible dans tout cela ? a poursuivi Mme Sayers. C’est que le rapport final sur les femmes autochtones assassinées ou enlevées a été déposé très exactement un an, jour pour jour pour jour, avant le décès de Chantel. Une mesure qui est censée faire changer les choses dans ce pays n’a pour ainsi dire pas été mise en œuvre. »

On peut d’ailleurs lire dans le Rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées que « […] la méfiance attribuable aux expériences négatives de mise en application de la loi continue à favoriser un environnement dans lequel, comme l’ont souligné de nombreux participants, les gens ne se sentent pas à l’aise de simplement demander l’aide de la police ».

Modifications aux contrôles de bien-être et au travail de la police

Mme Sayers a ensuite ajouté que, dans les circonstances, obtenir justice, ce serait obtenir des changements à la manière dont les contrôles de bien-être sont effectués au pays.Dans une entrevue accordée au Times Colonist, MmeMartin a déclaré que le petit ami de Chantel, vivant à Toronto, avait demandé à la police de procéder à un contrôle de bien-être auprès de la jeune femme parce qu’il craignait qu’elle ne subisse du harcèlement.

Selon Del Manak, chef de la police de Victoria, qui était présent au rassemblement sur les marches du parlement, un agent de police effectue un contrôle de bien-être lorsqu’on l’appelle pour lui demander d’aller voir comment une personne se porte parce qu’on craint pour son bien-être. Il a aussi déclaré en entrevue que les gens qui font ce type d’appel le font « pour une multitude de raisons », lesquelles sont souvent liées à des questions de santé mentale.

« Ce qu’on demande, c’est que Chantel obtienne justice et que les contrôles de bien-être soient repensés de fond en comble, a résumé Mme Sayers. Ce sont des intervenants au courant des traumatismes dont souffrent les gens, et non les policiers, qui doivent intervenir en premier lors de ces contrôles. »

Le Rapport final recommande aussi que des services de santé mentale soient intégrés à différents secteurs, notamment au système de justice pénale, aux services de logement et aux services de protection de la famille et de l’enfance. On peut ainsi y lire que « [pour ce qui est des services qui tiennent compte des traumatismes, un sentiment de sécurité est créé lors de chaque interaction » et que « [l’adoption d’une approche qui tient compte des traumatismes dans l’ensemble des politiques, des procédures et des pratiques relatives aux solutions et aux services est essentielle à la mise en œuvre des appels à la justice ».

Organisme de surveillance autochtone et appels à la justice

Jeremy Son, le policier qui a abattu la jeune Autochtone, a d’abord été mis en congé payé, mais a ensuite été réintégré dans ses fonctions et affecté à des tâches administratives.La famille de Mme Moore a déposé deux plaintes contre des agents de police d’Edmundston auprès de la Commission de police du Nouveau-Brunswick. L’une demande le renvoi de l’agent Son. L’autre est une plainte contre un policier qui a ri en parlant du drame dans une entrevue vidéo accordée à CTV News le 5 juin.Les chefs héréditaires tla-o-qui-aht ont publié un communiqué le 20 juin afin de demander que l’agent Jeremy Son soit accusé de meurtre en vertu du Code criminel du Canada. Ils ont déclaré que la mort de MmeMoore leur « semble insensée, évitable et être un acte de racisme systémique ».

La famille de Mme Moore s’est aussi dite préoccupée par la possibilité que le BEI ne recommande pas le  dépôt d’accusations contre le policier qui a abattu la jeune femme. Dans les 125 enquêtes indépendantes ouvertes par le Bureau à la suite d’un cas de blessure ou de mort causé par des policiers, aucune accusation n’a été portée contre la police.Au rassemblement du 5 septembre, Mme Sayers a en outre souhaité que les Autochtones prennent part au traitement des plaintes visant la police.

« De cette manière, il y aurait une compréhension des façons de faire autochtones, des connaissances autochtones, a-t-elle expliqué. Nous avons besoin d’un organisme de surveillance autochtone pour tous les corps de police au Canada. »

Les députés néo-démocrates Gord Johns (Courtenay–Alberni) et Laurel Collins (Victoria) ont également pris part au rassemblement. La circonscription de M. Johns recouvre en partie le territoire nuu-chah-nulth. Mme Sayers a rappelé que le député a offert son soutien à la famille de Mme Moore « dès le début ».

  1. Johns et Mme Collins, qui se sont tous deux dits favorables à ce que des modifications soient apportées aux contrôles de bien-être au pays, ont assuré qu’ils continueraient à demander de tels changements.

« Nous devons faire en sorte que les citoyens, en particulier les Autochtones, aient confiance dans un processus de surveillance de la police, a déclaré Mme Collins dans une entrevue. Nous devons aussi nous assurer que nous changeons la façon dont les policiers font leur travail et la façon dont les contrôles de bien-être sont réalisés. Toutes ces choses font partie du racisme systémique qui sévit dans la plupart de nos communautés. »

L’actualité à travers le dialogue.
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