Justice sociale
Révolution du troisième âge : des aînés lancent un appel au changement
7/2/21
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5 Minutes

Peu après que la pandémie s’est installée dans nos vies, le drame des CHSLD a éclaté. Choqués, perturbés et tristes, les Québécois cherchaient des réponses à des événements jamais vus. Comment expliquer l’incompréhensible ?

Il ne suffit que de quelques paroles pour que la sagesse de Lucille Nadeau-Brunet, cumulée au fil de ses 96 ans d’existence, envahisse le petit salon de son appartement du nord de Montréal.

Choquée par l’hécatombe causée par la pandémie dans les Centres hospitaliers de soins longue durée (CHSLD), elle s’est fait un devoir de dire tout haut ce qui, selon elle, cloche. Dans une lettre ouverte devenue virale après avoir été publiée sur Facebook, elle appelle à une « révolution du troisième âge ». Entièrement autonome, elle déplore qu’« on ne demande pas » aux personnes âgées ce qu’elles veulent comme mode de vie.

« La personne âgée est marginalisée, et on ne l’intègre pas, ou très peu, aux grandes décisions touchant l’avenir de la société, encore moins à celles qui la concernent », explique la dame d’une voix de soprano marquée par le passage du temps. Elle croit que la situation dramatique qui a été mise en lumière dans les CHSLD du Québec n’est qu’un symptôme de ce phénomène, qui fait en sorte que ces personnes sont considérées comme des « êtres de trop ».

Afin de s’assurer de limiter la contagion, le gouvernement a mis en place des mesures draconiennes qui ont souvent laissé des personnes dans des situations précaires où elles étaient dépourvues du soutien fourni par leur famille.

Pour éviter qu’un tel drame se reproduise, Mme Nadeau-Brunet appelle à l’instauration d’une « politique du vieillissement » : « Il est important que le Québec en soit doté et reconnaisse ainsi officiellement la place et le rôle des aînés, ainsi que les services qui doivent leur être attribués. »

Des petits soins qui valent beaucoup

Également âgée de 96 ans, Thérèse Taschereau vit avec sa fille, José Taschereau, et le mari de celle-ci en banlieue de Québec depuis presque 10 ans. Une rallonge de leur maison l’accueille et lui permet de garder un certain degré d’autonomie, ce qui, selon José, ne serait pas possible en CHSLD. « Elle fait son petit-déjeuner, un peu de vaisselle, ramasse les poils du chien par terre », explique José, qui est bien consciente de l’importance de ces petites tâches qui permettent à sa mère de se sentir valorisée dans leur nid familial.

Les témoignages émanant des CHSLD contrastent avec la réalité que vit Thérèse en ces temps de pandémie. Bien que son rendez-vous hebdomadaire à la coiffeuse ait été annulé pendant plusieurs semaines, le quotidien de celle qu’on surnomme « Gangan » est resté grosso modo le même. José a conscience de la chance qu’a sa mère de vivre avec elle : « Je pense que ce ne sont pas toutes les personnes qui peuvent rester chez elles jusqu’à la fin. […] Ce n’est pas possible pour tout le monde. Je suis contente de le faire, mais il faut que les conditions gagnantes soient réunies pour que ça marche. »

L’actualité à travers le dialogue.
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