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De Kanesatake à Montréal-Nord, ceux qui vivent la loi 96
Le projet de loi 96, qui est devenu loi et est entré en vigueur en juin dernier, vise à renforcer la langue française au sein de la société. Photo: Ramy Berkani
5/8/2022

De Kanesatake à Montréal-Nord, ceux qui vivent la loi 96

temps de lecture:
5 Minutes
Initiative de journalisme local
Journaliste:
ILLUSTRATEUR:
COURRIEL
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Note de transparence

La langue française occupe une place fondamentale dans la société québécoise. C’est la langue de la culture, de la politique et de la vie de tous les jours. Le fait français en Amérique du Nord est une singularité célébrée par les Québécois francophones et tous ceux qui chérissent la diversité. Pourtant, partout au Québec, des gens ont un rapport moins positif à la langue française. De Kanesatake à Montréal-Nord, plusieurs nous racontent leur relation avec le français.Le projet de loi 96, qui est devenu loi et est entré en vigueur en juin dernier, vise à renforcer la langue française au sein de la société.

À ce titre, cette loi touche de nombreux domaines, dont la santé, l’éducation et l’immigration. Parmi les changements qu’elle amène, on peut notamment citer les cours de français supplémentaires dans les cégeps anglophones, l’obligation pour les immigrants d’apprendre la langue française en six mois ou encore l’instauration du français comme langue obligatoire dans les services publics, à moins de faire partie d’une communauté historiquement anglophone.

« Les cours de francisation ne suffisent pas »

Hany Shokair, étudiant de l’Université Concordia et réfugié syrien depuis 2019.
Photo: Fatima Bah

« Six mois, ce n’est pas assez pour apprendre une langue. Lorsqu’on parle d’une langue, on parle d’une culture, d’une manière de penser. Il ne s’agit pas juste de répéter un mot encore et encore », déclare Hany Shokair, étudiant de l’Université Concordia. Pour lui, ce fut un choc d’entendre parler de l’article 22 du projet de loi 96. Cet article oblige les organismes administratifs à offrir un service exclusivement en français aux immigrants à la fin de la période de six mois suivant leur arrivée au Québec. Hany est lui-même passé par cette étape migratoire après être entré dans la province en 2019 en tant que réfugié syrien.

Il se range derrière plusieurs experts qui dénoncent cet article de loi, le considérant discriminatoire. Assis devant une table dans sa cuisine, le jeune homme explique son vécu durant ces premiers mois au Québec et son expérience dans les cours de français. En tant que réfugié, il a été obligé de quitter sa vie, et tout ce qu’il avait construit, pour venir dans un pays où il n’avait aucun repère. Il a été inscrit à des cours de francisation par la personne qui s’occupait de son dossier, quelques semaines après son arrivée. Pour Hany, la francisation a été une épreuve très difficile : « Cela m’a littéralement pris deux mois pour comprendre que le “a” et le “e” se prononcent de manière différente en français et en anglais. » Selon lui, obliger des gens qui fuient leur pays et qui ont un passé douloureux à maîtriser une nouvelle langue en six mois, c’est minimiser leur traumatisme et leur passé. « Quand j’étais à l’école, mon cerveau pensait à mes problèmes, je n’étais pas dans de bonnes conditions pour apprendre le français. » En lui-même, le processus migratoire est une lourde charge que ces individus doivent surmonter en vivant beaucoup de stress.

Pour l’étudiant d’origine syrienne, les cours de francisation représentaient aussi l’une de ses seules sources de revenus. « Durant mes six ou sept mois à l’école, je n’étais mentalement pas prêt pour apprendre le français. J’avais juste peur que, si je manquais un cours, le gouvernement ne me paie pas et que je ne puisse pas payer mon loyer », confie-t-il. C’est dans son appartement du Vieux-Rosemont qu’il partage avec un autre étudiant étranger que le jeune homme poursuit : « On apprenait tout si rapidement ! Par exemple, une semaine, on apprenait les verbes au temps présent et la semaine suivante, on apprenait le passé. »

À la fin de ses cours, Hany n’avait pas un bon niveau en français. Après sept mois de francisation, il a seulement pu se trouver un emploi en tant que commis dans une épicerie. « Même avec mon niveau, mes employeurs n’avaient pas assez confiance en moi pour me laisser travailler durant de longues heures », explique ce diplômé en relations internationales et en ingénierie de Syrie et du Liban.

Faisant face à tant de difficultés dans son apprentissage du français, Hany décide de se tourner vers l’Université McGill pour perfectionner son anglais. Il estime que le système anglophone est plus adapté à sa réalité. « J’étais dans un système universitaire et j’avais plus de temps de pratique, mais le plus important était le fait d’avoir un service de soutien mental et des conseillers », nous dit l’étudiant en sexologie à l’Université Concordia, qui continue toujours à pratiquer son français dans le cadre de ses implications bénévoles.

Le réseau francophone n’est pas aussi accueillant pour les immigrants

Djazia Bousnina, une jeune diplômée en sciences politiques à Concordia
Photo: Ramy Berkani

Le parcours de Hany Shokair rappelle celui de Djazia Bousnina, une jeune Algérienne diplômée en sciences politiques à Concordia.

Assise dans un confortable fauteuil de l’espace verdoyant du parc Pierre-Laporte, à Montréal-Nord, Djazia nous explique son rapport particulier à la langue française. La jeune montréalaise a émigré d’Algérie il y a de cela une dizaine d’années avec le reste de sa famille. Elle parle couramment français. Tout son entourage, incluant bien évidemment ses amis et sa famille, parle uniquement français et arabe. Elle n’a donc aucune difficulté à s’intégrer sur le plan linguistique. Arrivée au Québec, elle fréquente une école francophone secondaire à Anjou.Pourtant, quelques années plus tard, Djazia fait le choix d’arrêter de vivre en français. Quand on l’interroge sur ce choix, elle ne mâche pas ses mots. « Ce n’est pas une langue avec laquelle j’ai beaucoup d’affinités, confie-t-elle. Surtout lorsque mon grand-père a su que je parlais français au Québec, il était vraiment fâché.

Mon grand-père, c’est un Algérien. Il a vécu la guerre d’Algérie, l’indépendance. Ça l’a vraiment touché quand il a su que nous, ici, on parlait français. Durant ce temps, j’ai aussi commencé à lire, ce qui m’a vraiment ouvert l’esprit par rapport à la réalité de la colonisation en Algérie par la France. » Mais ce n’est pas que le passé colonial de l’Algérie qui éloigne la jeune Montréalaise du français. Son expérience dans le monde anglophone a été complètement différente de celle qu’elle a vécue dans les sphères francophones, raconte-t-elle avec émotion. Elle ajoute avoir vécu plus de situations d’exclusion au travail et à l’école dans des environnements francophones.

Selon elle, il existe une ouverture d’esprit, une sensibilité, un soutien académique et une compréhension de la réalité des personnes immigrantes plus importants dans les milieux anglophones au Québec. À la fin de ses études secondaires, Djazia a décidé de quitter complètement le réseau francophone. Direction Dawson, un cégep anglophone, puis Concordia, une université anglophone. « Le soutien qu’on te donne est tellement grand, surtout quand tu viens d’une école francophone, précise-t-elle. On te demande si tu viens d’un secondaire francophone, puis tu as des services qui sont vraiment disponibles pour toi », rapporte la jeune diplômée.

Aujourd’hui, Djazia Bousnina pense que ses études postsecondaires auraient été très difficiles si elle les avait faites en français. « Je pense que j’aurais réussi mes études, parce que je suis une immigrante et qu’on se met beaucoup de pression, mais je ne pense pas que j’aurais aimé mon parcours et je ne pense pas que j’aurais osé étudier en politique. »

Djazia ne voit pas la nécessité de la loi 96. Pour elle, demander à des personnes qui parlent plusieurs langues de vivre uniquement dans une seule langue, le français, est utopique. Cela a uniquement pour conséquence d’empêcher des personnes qui ont un profil culturel diversifié de s’épanouir dans différentes cultures. « Imaginez dire à quelqu’un : “Arrête d’être riche, devient plus pauvre.” C’est ce qu’on demande aux gens. Arrêtez d’être riche, devenez plus pauvre ! C’est fou, parce qu’on ne dirait jamais ça à quelqu’un.

Mais l’État le demande, l’État efface des gens [...] c’est un effacement culturel, et on le permet parce qu’on ne voit pas la culture comme un capital social. On la voit comme un inconvénient social. »

Djazia reconnaît que son rapport au français a évolué, notamment grâce à certains de ses auteurs préférés, dont Frantz Fanon et Ocean Vuong. Si elle nous confie que, par le passé, elle tenait énormément à ne pas vivre en français, aujourd’hui elle a changé d’avis. Elle voit désormais dans le français au Québec un grand pouvoir décolonial. « Beaucoup de révolutionnaires ont écrit en français et ont créé un système de révolution, de challenges, une nouvelle dynamique en français. Maintenant, je reconsidère l’écriture en français. »

Hany et Djazia, nous disent qu’ils auraient peut-être fait le choix de poursuivre leurs études en français s’ils avaient reçu un meilleur accueil dans le réseau francophone québécois.

Les langues traditionnelles autochtones oubliées

Teiawenhniseráhte Jeremy Tomlinson, directeur du Centre de santé de Kanesatake.
Photo: Fatima Bah

L’héritage colonial associé au français se fait aussi sentir sur les territoires autochtones, où les inquiétudes causées par la loi 96 sont très vives. À Kahnawake et Kanesatake, plusieurs résidents nous confient qu’ils ont d’autres priorités que la protection du français au Québec, étant davantage préoccupés par les séquelles des traumatismes intergénérationnels et la revitalisation du Kanien’kéha, la langue mohawk. L’exaspération face à la langue française et aux demandes des Québécois revient dans chacune de nos rencontres avec des Autochtones dans les deux réserves. Tous affirment la même chose : les langues autochtones sont en péril. Les protéger et les revitaliser sont les priorités des Autochtones, pas le fait de parler le français, qui est pour eux une langue coloniale. « Combien de fois quelqu’un m’a dit : “Parle en français", nous raconte Teiawenhniseráhte Jeremy Tomlinson, directeur du centre de santé de Kanesatake. À cela, je réponds souvent : “Techniquement , tu es sur le territoire des Kanien’kehá:ka.

Tu es chanceux que je ne te demande pas de parler mohawk”. »« Les Québécois francophones sont fiers de leur langue », assure de son côté Jeff, un aîné de la réserve de Kahnawake qui préfère taire son nom complet. « Tant mieux pour eux. Qu’en est-il de nous ? Nous aussi nous sommes fiers de notre langue. Vous n’essayez pas de parler notre langue. Pourquoi voulez-vous qu’on parle la vôtre ? » questionne-t-il.Le conseil de bande de Kahnawake a instauré des cours de mohawk pour permettre aux jeunes d’apprendre leur langue traditionnelle dans les écoles. La même initiative a été prise sur le territoire mohawk de Kanesatake, où le nombre de personnes qui parlent kanien’kéha, ne fait que baisser. « Il y a 9 ans, il y avait 150 personnes qui parlaient notre langue, ici, à Kanesatake ; aujourd’hui, il en reste moins de 40 », déplore Teiawenhniseráhte Jeremy Tomlinson. Dans le centre de santé de Kanesatake, difficile de ne pas remarquer les pancartes des différents départements.

Elles sont en trois langues : l’anglais, qui figure en premier en haut des affiches, puis le kanien’kéha juste en dessous, et enfin le français, qui se trouve en bas en plus petits caractères. Ailleurs, sur une affiche, il est demandé aux patients qui entrent de se laver les mains, d’abord en anglais, puis en français et finalement en kanien’kéha. Le directeur du centre de santé ne craint pas de devoir changer ses affiches pour y placer le français en premier. « Ils [le gouvernement québécois] peuvent essayer, mais je ne suis pas inquiet. Je pense qu’il y a une ligne à ne pas franchir », répond-il. Même si la loi prévoit des exceptions pour les communautés historiquement anglophones comme celle de Kanesatake, les communautés ont peur que ces directives, qui viennent des plus hautes instances, ne soient pas nécessairement appliquées au plus bas niveau de la hiérarchie. Des personnes des communautés autochtones anglophones avec qui nous avons discuté craignent que la loi 96 ait certains effets pervers. « J’ai parlé avec plusieurs aînés, et il y a beaucoup de stress, car ils sont dans une période de leur vie où ils ont le plus besoin de soins de santé », s’inquiète Teiawenhniseráhte. La loi 96 exige que les soins de santé soient prodigués en français, sauf dans certaines situations.

Il y a quelques semaines, dans la communauté de Kanesatake, un aîné a souffert d’un malaise cardiaque. Il a décidé de se rendre à l’hôpital de Hawkesbury, en Ontario, à environ 45 minutes du territoire mohawk, plutôt qu’à celui de Saint-Eustache, situé à quelques minutes. « C’est pour avoir un service dans la langue qu’il comprend et dans laquelle il se sent le plus confortable », répond Jeremy Tomlinson quand on lui demande ce qui a poussé cet aîné à se rendre aussi loin. L’aîné a été victime d’une crise cardiaque dans la salle d’attente de l’hôpital. Incapable de le réanimer, l’hôpital l’a transporté dans un autre institut, à Ottawa, où il a fini par perdre la vie. Sans dire que cet aîné est décédé à cause de la loi 96, Teiawenhniseráhte estime que cette situation illustre les appréhensions des Autochtones anglophones face aux services de santé francophones. Et la santé n’est pas le seul domaine touché par cette loi.

Contrairement aux enfants de la loi 101, pour qui les places sont plafonnées, les étudiants autochtones anglophones pourront fréquenter le cégep en anglais sans limites. Néanmoins, ils devront, comme tous les étudiants des cégeps anglophones, suivre trois cours supplémentaires en français ou de français au lieu de deux cours en français. Teiawenhniseráhte craint que les jeunes autochtones anglophones, qui ont un taux de décrochage scolaire très élevé, aient encore plus de difficultés à obtenir leur diplôme d’études collégiales en raison de cette disposition de la loi 96. Dans une perspective de réconciliation, il propose plutôt que les élèves autochtones puissent être accommodés et aient la possibilité d’apprendre le kanien’kéha pour terminer leurs études collégiales. Dans un contexte où l’on tente de revitaliser les langues et cultures autochtones, Jeremy Tomlinson craint que la loi 96 ne ravive les tensions entre les communautés autochtones et francophones.

Il cite le fait que les personnes autochtones soient peu consultées sur des décisions qui les affectent quotidiennement pour expliquer, entre autres, les mauvaises relations entre le gouvernement du Québec et les Autochtones. Le directeur du centre de santé de Kanesatake avance cela en se remémorant l’expérience négative qu’il a vécue à l’Assemblée nationale du Québec, où il s’est rendu pour débattre de la loi 96. « Ils m’ont donné 15 minutes pour parler, et le temps que je commence à parler, ils m’ont coupé dans mon temps de parole parce qu’il y avait des problèmes techniques. »

« Honnêtement, je pense que nous avons trop tardé à avoir une vraie rencontre de nation à nation », affirme l’ancien chef du conseil de bande de Kanesatake. Selon lui, il est plus que primordial que les intérêts de sa communauté soient protégés et que le gouvernement en tienne compte.

« On ne veut pas d’une langue coloniale »

Lynn Delisle et Marlyn Kane, deux aînées de Kahnawake
Photo: Ramy Berkani

Lynn Delisle et Marlyn Kane, deux aînées de Kahnawake, n’ont jamais eu la chance d’apprendre à parler le kanien’kéha. Elles nous reçoivent dans leur demeure pour discuter de leur rapport à la langue. Dans le jardin de Lynn, une pancarte contre la loi 96 est placée bien en évidence. Dans le but de protéger la langue française au Québec, la loi sur la langue officielle et commune du Québec pousse la population à apprendre et à parler le français. Cela ramène Lynn Delisle et Marlyn Kane à l’époque où on essayait d’assimiler les Autochtones. « Nous sommes peut-être trop sensibles au fait que des gens nous imposent quoi que ce soit… » réagit Lynn Delisle, l’une des mères fondatrices du Step by Step, Family and Child Centre de Kahnawake. Aujourd’hui, de nombreuses initiatives sont mises en place à Kahnawake pour protéger la langue mohawk. Lynn et Marlyn nous confient qu’elles ne pouvaient profiter de ce genre d’initiatives lorsqu’elles fréquentaient l’école anglophone. « Nous sommes presque comme la génération sacrifiée.

Bien que, parmi ces autres générations, certains ont été punis pour avoir parlé leur langue », nous confie Lynn Delisle. Marlyn Kane abonde dans le même sens.Les grands-mères nous expliquent que, pour elles, la langue constitue une partie importante de leur culture et qu’elle établit un pont avec la jeunesse autochtone. Pour elles et pour de nombreux Autochtones des différentes communautés, le changement n’a pas toujours été synonyme de quelque chose de bon.« Parler français nous faciliterait la vie, explique Lynn. On aurait des jobs. On aurait plus d’influence sur le gouvernement québécois. »

Elle poursuit : « Les gens disent : “ Non, on ne va pas apprendre le français. On n’est pas francophones.” Je les regarde et je dis : “Nous ne sommes pas anglophones non plus.” » Au fil de la discussion, on comprend que, ce qui la dérange, c’est plutôt le fait que la loi 96 impose une langue qui n’est pas la leur, encore une fois. « Ce n’est pas une façon de faire les choses, et je le vois si souvent que ce n’est jamais réconfortant… On ne nous demande pas où nous en sommes avec le français, si on a besoin de soutien à l’égard de la langue française et de la culture francophone. Imaginez s’ils étaient venus à nous [les peuples autochtones] de cette façon. Ils vont à la guerre au lieu de collaborer », conclut Lynn.

Ce que dit le gouvernement

La Converse a interrogé le bureau du ministre responsable du français et de la francisation, Simon Jolin-Barrette, sur les préoccupations relevées par nos intervenants. À propos des craintes liées à l’application de la loi dans la santé et les services sociaux, le cabinet du ministre nous a répondu que la loi 96 « est très claire sur la question des soins de santé » et qu’elle n’empêchera pas un citoyen d’être soigné adéquatement, ajoutant qu’un amendement avait été ajouté afin de rassurer les Québécois d’expression anglaise et que des exceptions étaient prévues au projet de loi 96 en matière de santé, de sécurité ou lorsque les principes de justice naturelle l’exigent.

Le cabinet n’a cependant pas précisé comment il s’assurera que les amendements soient respectés à tous les niveaux. Sur la question des langues autochtones, le cabinet du ministre indique avoir élaboré le projet de loi 96 de telle sorte qu’il « ne contrevient[ne] pas au droit des Premières Nations et des Inuit d’assurer le maintien et le développement de leurs langues et cultures traditionnelles », tout en indiquant que « la protection de la langue française et la protection des langues autochtones ne s’opposent pas ».

Le cabinet n’a pas indiqué s’il accorderait ou non une exemption aux élèves autochtones qui souhaitent apprendre leur langue ancestrale. À propos des nouveaux arrivants, le cabinet n’a pas précisé comment il entendait accommoder les personnes qui ne savent pas lire et écrire ou qui ont vécu des traumatismes. Le cabinet du ministre a plutôt réitéré que la marge de six mois qu’a prévue Québec « pour les situations particulières qui nécessiteraient l’usage d’une autre langue que le français ne représente pas un délai pour apprendre le français », ajoutant que des exceptions sont prévues et que les personnes immigrantes seront servies en français. Aucune précision n’a été apportée au sujet des conséquences sur le processus migratoire des nouveaux arrivants qui ne maîtriseraient pas le français au terme de cette période de six mois.

Enfin, à propos des préoccupations manifestées par certains jeunes racisés sur les espaces francophones, le cabinet s’est contenté de rappeler l’objectif de la loi sans préciser comment il compte faire face aux sentiments d’exclusion que disent vivre ces jeunes dans les espaces francophones.

Pour aller plus loin…

Pendant des décennies, les Canadiens-francais ont été victimes de discrimination. Jusqu’en 1960, les hommes anglophones au Québec gagnaient beaucoup plus et étaient davantage privilégiés que les hommes canadiens-français bilingues. Il a fallu attendre la Révolution tranquille, dans les années 1960, pour que des changements socio-économiques considérables surviennent et améliorent le sort des Québécois.

Depuis la Révolution tranquille, les gouvernements québécois s’appliquent à protéger l’identité québécoise, notamment en renforçant la langue française. « Ce projet de loi a pour objet d’affirmer que la seule langue officielle du Québec est le français. Il affirme également que le français est la langue commune de la nation québécoise. » Ce sont les premiers mots du projet de loi 96. En mai 2021, le gouvernement Legault dépose ce projet de loi, lequel vise à « réduire le déclin de la langue française dans la province ».

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